Animer un World Café en salle ou à distance

31 janvier 2021

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L’approche World Café vise avant tout à organiser l’échange d’idées et la réflexion collective. Très souple dans sa mise en œuvre, son champ d’application est étendu : de stimuler l’instauration d’échanges entre personnes qui ne se connaissent pas jusqu’à élaborer une politique ou le plan stratégique d’une organisation.

Les principes fondamentaux

L’objectif est de conduire efficacement un grand nombre de personnes à engager des conversations constructives, permettant d’imaginer une solution à un problème. La méthodologie consiste à introduire des ruptures dans les modalités de travail habituelles afin de stimuler la coopération et la créativité.

  1. Conduire chacun à remettre en cause ses hypothèses

Le principal obstacle à la créativité et au dialogue réside dans la conviction de bien connaître le problème. En contexte professionnel, il est jugé parfaitement naturel – et souvent valorisé – que chacun aborde un débat en cherchant à défendre la solution qu’il recommande. De fait, pour de nombreux problèmes du quotidien, cette approche a le grand mérite de l’efficacité : les débats se limitent à trancher entre les options imaginées par chacun. Mais dès lors que le problème est complexe, et que l’enjeu le justifie, ce souci d’efficacité devient contre-productif. En effet, il est hautement improbable que quiconque dispose de l’ensemble des éléments nécessaires pour imaginer une solution appropriée: il faut donc veiller à ce que chacun prenne le temps d’appréhender le problème dans sa globalité avant de commencer à imaginer une solution.

Or les réflexes professionnels sont fortement ancrés. Pour engager efficacement une réflexion collective, il faut donc lutter délibérément contre la tendance à vouloir défendre son point de vue initial. Plusieurs techniques permettent de conduire chacun à reconnaître que son point de vue est partiel ou mérite d’être remis en cause

  1. Instaurer des mécanismes d’écoute.

Quelques règles simples peuvent avoir un impact majeur sur la qualité d’écoute. Ainsi les organisateurs de World Cafés ont volontiers recours à la “pierre de dialogue”. Il s’agit simplement d’une pierre, ou de tout autre objet, qui confère à son seul détenteur le droit de parler: les 3 ou 4 autres participants assis à sa table ne sont pas autorisés à l’interrompre. Paradoxalement, cela conduit chacun à être plus efficace dans ses propos, la conscience de monopoliser la parole étant plus aiguë. Un autre mécanisme consiste à inviter les participants à décider régulièrement d’une à deux minutes de réflexion silencieuse pour faire le point sur les échanges. Dans les deux cas, on évite la dynamique de ping-pong verbal qui freine l’écoute en focalisant chacun sur la préparation de sa prochaine répartie.

  1. Focaliser l’attention sur la production collective

Certaines techniques incitent les participants à se concentrer sur la globalité des échanges plutôt que sur la défense de leur propre point de vue. Ainsi, les participants à un World Café sont invités à représenter graphiquement, sur la nappe en papier qui couvre la table, les associations d’idées qui émergent des échanges: cette construction graphique collective, à laquelle chacun contribue au fil des discussions, aide à focaliser l’attention sur une vue d’ensemble des débats. De même, lorsque les participants changent de table pour entamer un autre tour de discussions, ils ont pour consigne de se faire l’ambassadeur des échanges auxquels ils viennent de participer: ce rôle les incite naturellement à prendre du recul sur leur point de vue d’origine.

  1. Conduire chacun à se rapprocher des autres

La qualité de la coopération entre individus est d’autant plus élevée que ceux-ci ont le sentiment d’appartenir à une même communauté, qui partage les mêmes enjeux. Le simple fait de partager une expérience commune riche en intensité constitue un facteur de rapprochement.

  1. Organiser la combinaison des idées

La combinaison des réflexions de tous peut être organisée au moyen de méthodologies rigoureuses. Comment parvenir à combiner les contributions de plusieurs dizaines de personnes pour aboutir à une production collective cohérente? La réponse réside bien sûr pour partie dans la succession des différentes étapes qui constituent les séminaires. Mais la structuration des étapes de travail n’est pas tout.

D’autres mécanismes se révèlent extrêmement utiles

- Favoriser l’instauration d’un langage commun

Instaurer une compréhension partagée et un langage commun entre les participants les aide à échanger efficacement sur des notions ou des idées complexes. C’est pourquoi les organisateurs de Wold Café ontvolontiers recours aux métaphores. Lors d’un séminaire, les participants ont par exemple été invités à se subdiviser en sous-groupes pour réfléchir aux conditions de succès de leur organisation si elle était… une fourmilière, une forêtéquatoriale, un corps humain, un paquebot, etc. Les enseignements de ces réflexions ont ensuite été partagés etdébattus en session plénière. Par la suite, la référence à ces différentes métaphores s’est faite naturellement, favorisant des échanges riches et effi- caces à un niveau d’abstraction élevé

- Organiser l’enrichissement croisé entre sous-groupes de travail

Il est classique d’organiser des sous-groupes de travail qui partagent ensuite leurs résultats en session plénière. Il est moins classique, mais tout aussi efficace, de faciliter le transfert des idées entre sous-groupes de travail. Cette approche est au cœur même de l’approche World Café, qui initie des conversations par tables de 4 à 5 participants, puis réorganise les tables en demandant à chaque participant de restituer la teneur des propos auxquels il vient de participer.

- Regrouper visuellement le résultat des réflexions individuelles ou des sous-groupes.

La présentation visuelle des réflexions collectives se révèle souvent très puissante. On peut pour cela inscrire sur un mur les mots ou idées clés issus des discussions, accompagnés de flèches ou de dessins qui en mettent les principales significations en évidence. Cela permet non seulement de présenter une vision d’ensemble du problème ou des débats, mais aussi de mettre en évidence la richesse des travaux produits.

Une alternative au dessin consiste à organiser au mur le regroupement de cartons exprimant les idées clés produites par chaque sous-groupe. Ainsi, pour mettre au jour les vrais problèmes de leur organisation, des participants ont été invités à répondre à quatre questions, sur quatre cartons de couleurs différentes: qu’en dites-vous lors des discussions officielles? qu’en dites-vous avec vos collègues proches? que pensez-vous que les autres en disent? pourquoi ne dites-vous pas ce que vous pensez vraiment? Le mur ainsi constitué a servi de point de départ à des échanges très riches.

- Créer un environnement propice à la créativité.

L’enjeu consiste à créer une atmosphère et des conditions de travail qui invitent à la fois à la concentration et à la libre exploration des idées

- Favoriser la pensée latérale (analogie, métaphore, …)

Fonctionnement d’un World Café

Quelques principes simples sont au cœur du World Café :

  1. La création d’un espace agréable, invitant à des discussions détendues.
  2. L’organisation des discussions par petites tables de 4 ou 5 participants, échangeant pendant environ 20 à 30 minutes, et invités à garder trace des échanges en dessinant sur la table ou à écrire leurs idées.
  3. L’organisation de tours de discussion successifs au cours desquels les participants changent de table et se font l’ambassadeur des enseignements de la discussion à laquelle ils viennent de participer.
  4. Souvent, la mise en commun des enseignements lors d’une session plénière.

D’après The World Café*, Juanita Brown avec David Isaacs, éd. Berrett-Koehler, 2005*

Vous souhaitez digitaliser tout ou partie de votre Worldcafé ? l’animer en distanciel ou intégrer le digital dans la session en présentiel ?

Souvenez-vous, en distanciel, restez SIMP & CLARH

le plus simple pour les outils, le plus clair, précis, rythmé sur la production collective et la relation humaine ou le plaisir d’être ensemble.

Il existe une belle palette d’outils au service du distanciel (Klaxoon, padlet, Framapad, Mural, Miro, …). Cependant ces outils peuvent être énergivores sur le plan cognitif. Avant de les utiliser, veiller à vérifier le background technique des participants.

En visio, redoubler d’attention à la relation humaine (météo émotionnelle, brise-glace,…) et proposer des temps synchrones ou asynchrones de co-production en petits groupes de 2 ou 3 personnes avec une consigne claire et précise (Zoom, Teams, Webex proposent la création de salles pour les sous-groupes).

Partager les enseignements clés issus des travaux en sous-groupe (possible sur framapad ou Klaxoon).

Pour la validation collective, cela peut se faire également en synchrone ou asynchrone en fonction de l’ordre du jour). Klaxoon propose la fonction sondage ou le like pour recueillir les préférences des participants.

L’application Klaxoon propose un espace digital adapté spécialement pour ce type de situation. En voici ici un aperçu.

Vous avez déjà animé un World Café en distanciel et êtes prêt(e)s à témoigner de votre expérience ? Je serais ravi de partager nos expériences.